Je n’ai jamais compris le principe de faire un enfant pour donner un sens à sa vie (ou à LA vie). Comme le dit si bien un commentateur en réponse à un billet de Patrick Lagacé sur son blogue aujourd’hui:
Si tu fais des enfants, tu fais juste transférer ta «malédiction» dans un autre contenant, qui se dira un jour à son tour «I have no reason to be alive»…
Il me semble qu’avant de se reproduire, ça serait une grande faveur à faire à l’enfant d’avoir d’abord trouvé un sens à sa propre vie, non? Ou encore d’avoir décidé que la vie n’a pas vraiment de sens et que c’est ben correct comme ça au fond. Mais faire un enfant pour trouver la paix, en espérant que ce petit être, qui ne nous a surtout rien demandé, vienne combler quelque chose en nous, vienne remplir un vide existentiel? Ça me parait injuste et un peu « cul par dessus tête » comme raisonnement. Je ne dis pas que c’est mal ou que c’est ridicule. Je connais bien des gens qui ont choisi de faire un enfant pour les mauvaises raisons, mais qui sont tout de même de bons parents.
Et dire que certains croient que ne pas avoir d’enfant est un choix égoïste…
Comme le raconte Chroniques Blondes aujourd’hui:
On se dit qu’il faudrait mettre un moratoire sur nos naissances et prendre soin de ceux, si nombreux, si nombreux, qui existent déjà .
Nobody has a kid before every kid is taken care of.
Dans son billet, Patrick dit:
Mon amie fait partie de cette tribu de filles qui ont plus de 33 ans, qui n’ont pas de bébé. Peut-être se sent-elle interpelée par ce passage de Martha. Peut-ête en veut-elle un. Ou deux. Ou trois. Elles sont des milliers, comme ça, qui voudraient bien faire exploser notre taux de natalité, faire exploser le 1,4 bébé par fille, mais bon, il y a la vie qui se dresse entre elles et ce bébé-virgule-quatre… Des milliers de filles qui veulent laisser une trace…
Je ne sais pas trop pourquoi – j’ai peut-être eu le cerveau lessivé (sans phosphate) par les écologistes – mais je n’aime pas l’expression « laisser une trace ». Ça me fait penser au ecological footprint. Je sais je sais. Ce n’est pas de ça dont il est question, mais bon, au-delà de l’aspect écologique, l’idée de vouloir laisser une trace en créant un autre être humain m’a toujours semblé absurde, même quand j’étais toute petite. (Je suis une rationnelle. On ne se refait pas.) On laisse une trace par ses gestes, pas par ses gènes.
Ces femmes qui ont vu la vie passer trop vite et qui se disent oh my god! I forgot to have children!, pourquoi doivent-elles vivre dans le regret? Pourquoi ne pas laisser de trace dans le coeur d’un enfant qui existe déjà ? Pourquoi ne pas être une grande soeur, ou une tante présente, ou une grande amie? Pourquoi ne pas donner un coup de main à des parents débordés ou qui ne savent pas donner l’attention nécessaire au bien-être des enfants? Pourquoi ne pas renouveler un peu le concept de laisser sa trace en faisant une véritable différence dans la vie de quelqu’un?
J’imagine que les mères me diront que seules les mères ont réponse à ces questions. Je n’aurai rien à leur répondre, bien sûr. Je ne suis pas dans le secret de ces déesses au bedon rond, celles qui savent quelque chose que je ne sais pas.
J’aime ton principe d’avoir eu le cerveau lessivé par les écolos…hahaha…et en plus sans phosphate…
On peut laisser une trace en écrivant un livre, un film, un article, en prenant une photo, en s’impliquant dans un organisme, en aidant les autres, en vivant quoi….
Étant une de ses femmes sans enfant ( mais sans chum non plus), je n’ai ressenti cette urgence qu’une seule fois, quand mon père est mort. J’avais l’impression qu’il survivait en moi et que je ne survivrais dans personne…C’est passé.
Mais je crois encore et encore qu’on lessive justement le cerveau des femmes en lui répétant ad nauséum ( presque une nausée de grossesse) qu’elles ne seront pas complète sans enfant….Alors je crois que leur horloge biologique s’affole plus pour réaliser ce besoin d’être « une vraie femme » que de laisser une simple trace..
Gros sujet miss ;-)
Oups « en leur répétant »….
Faut arrêter de dire aux filles que de faire un enfant, c’est le bout de la m… et qu’elles sont vides et inutiles si elles n’en font pas! Woooh. Des filles comme vous qui se posent des questions et qui décident que peut-être, ce n’est pas pour elles, c’est essentiel. Ce qui prouve, by the way, que vous feriez d’excellentes mères!
Cela dit, c’est pas parce qu’on ferait une excellente mère qu’il faut absolument en devenir une. T’sais veux dire.
Un moment donné faut arrêté de chercher du sens à notre petite existence dans tout ce qui se présente. Faire un bébé en couple ou toute seule, il me semble que ça devrait être parce qu’on a le goût de vivre avec un enfant avec tout ce que cela comporte. On mesure tout en terme d’accomplissements et de listes à faire – la case bébé doit y être sinon on est égoïste ou déroutée – comme autant de fleurs à nos boutonnières… Quant à moi, si un homme peut décider de ne pas avoir d’enfant sans que cela soit un problème, c’est la même chose pour les femmes. Lâchez-nous avec la finalité biologique!
Quel bon vent de vous lire ! J’aimerais qu’on puisse vivre dans une société qui laisse justement vivre. Que l’on puisse choisir d’être célibataire ou en couple, d’être mère ou non, sans se faire juger ou se faire dire qu’on est pas « normale ».
Chaque personne choisit son destin et décide pour elle-même (en général). Certaines femmes ont besoin d’être mère pour se réaliser, elle le choisisse, tant mieux mais d’autre non.
Je suis persuadée que plusieurs femmes capotent juste à cause de la pression sociale. Elles ne se questionnent même pas sur leur propre envie d’enfanter…Tandis que les hommes font bien ce qu’ils veulent…
Il y a bien des mecs qui ne devraient pas laisser d’autres traces que que celle du sperme sur un scott-towel. Pollueurs !
La maternité m’est arrivée comme un cadeau, au moment ou je croyais qu’il était temps de passer à une autre étape de ma vie. Dans le temps, on appelait ça un « accident », mais je refuse de voir ma merveille comme cela. Je préfère considérer son arrivée dans ma vie comme un signe, un cadeau. Aurais-je été malheureuse sans? J’avais 40 ans, une vie plus que remplie et des enfants des autres à gâter et à aimer. Je ne sentais pas, du moins consciemment, le tic-tac infernal de l’horloge biologique. Et je n’ai pas décidé de mener cette grossesse à terme dans l’espoir de laisser une trace. J’ai juste accepter ce que la vie m’offrait en espérant être à la hauteur. Morte de trouille, que j’étais. Que je suis encore parfois. Souvent.
Je me dit jusque qu’on ne fait probablement pas des enfants pour les bonnes raisons. En fait, faut-il une raison pour en faire? Faut-il une raison pour choisir de ne pas en faire? L’enfant ne sera jamais un remède au vide qui nous habite. Il fait juste faire en sorte qu’on est trop fatiguée, parfois, pour sentir le vide.
J’imagine qu’à l’époque ou on avait les enfants à la douzaine, les femmes n’avaient pas le loisir de se questionner sur la motivation profonde, et encore moins sur la possibilité d’avoir ou non des enfants. Un luxe de notre société à 1,4 bébé/femme…
Égoïstes, celles et ceux qui choisissent de ne pas avoir d’enfant? Je sais que c’est un sentiment répandu, mais je m’insurge! (Je sais que toi aussi, mais tu ne peux y faire allusion sans provoquer une montée de lait!) Moi qui élève un enfant, moi qui en veut au moins un à moi, moi qui vit dans un quartier où tous les parents ne font pas le strict minimum, je m’élève contre cette absurdité. Au contraire, quelles que soient les raisons qui fait qu’une personne ne veut pas d’enfant, je les trouve valides et la remercie de ne pas procréer — il y a suffisamment de parents malheureux (incapables, sans ressources, dans de mauvaises situations, etc.!), qui font des enfants qui s’en sortent plus ou moins bien, selon le cas, que ceux qui ne veulent pas de ce chemin puissent assumer leur choix! Bordel, vivre et laisser vivre, non?
Quant à mes raisons pour en vouloir, c’est une longue histoire de touches subtiles et d’instinct sauvage… ce sera pour une autre fois! (Par contre, après que j’aie joué le rôle de la mère au quotidien depuis six ans, je défie quiconque de nier mon désir sincère!)
De beaux témoignages qui sont tous pleins de bon sens. C’est rafraîchissant de lire ces points de vue de mères et de non-mères qui respectent les choix des unes et des autres sans les juger.
«Trouver un sens à sa propre vie», avant, après ou en dehors de la présence d’un enfant est le travail de toute une vie. Je suis un homme et je suis papa. Tout me disqualifie dans cette conversation.
Alors, je serai bref.
Le problème à ce que j’en sais est de penser que la paternité/maternité biologique apporte des prérogatives que la paternité/maternité relationnelle n’aurait pas. Nous sommes de passage dans la vie des enfants. Certains passent plus longtemps que d’autres. C’est tout.
Mon seul mérite de parent (s’il en est), risque d’avoir été confronté à l’exercice de savoir que j’ai contribué à la naissance de trois garçons et que j’ai la responsabilité de reconnaître qu’ils puissent avoir une vie entière et totale en dehors de mon contrôle, quel qu’il soit. En ce sens, beaucoup d’enfants ont la chance de rencontrer des personnes comme toi Martine, envers qui on est certain de rien devoir et qui peuvent avoir encore plus d’importance parce que désintéressé de tout intérêt personnel ou de sentiment de possession.
Avoir un enfant est un problème.
Donner la vie… Voilà le vrai défi!
Merci pour ces commentaires. Ce n’est pas évident à aborder comme sujet parce que j’ai toujours peur que les parents que je connais pensent que je porte un jugement sur le choix d’être parent, alors que ce n’est pas du tout le cas. C’est surtout l’image de l’enfant comme remède qui me fait réagir.
@Mario: Les hommes ne sont jamais disqualifiés de la conversation ici! T’as pas vu la grosse affiche au-dessus de ma taverne qui dit: « Bienvenue aux hommes »? ;-)
Ouf, que de propos intéressants, difficile d’y ajouter qqc à part le fait que je suis intimement impliquée dans la vie de Martine. Une tante présente, qui donne du répis aux parents de ses neveux qui en ont besoin, une tante qui se fait offrir une production avec photos et propos sur elle parce que la prof a demandé de faire une travail sur une personne importante pour l’élève ! N’est-ce pas aussi important que d’être parent en soi ? Plus jeunes, nos connaissances auraient pu penser que les rôles auraient été inversés. De mon côté, il n’était pas question de trouver un sens à ma vie avec un enfant, c’est comme si ça allait de soi, il y a 13 ans quand j’ai rencontré le papa. Être parent est le défi le plus difficile que j’ai eu à relever dans ma vie, un défi de tous les jours, mais ça, je ne le savais pas avant d’en faire ! Et ce qui vient le plus me chercher dans vos propos est le commentaire de Marie-José: « L’enfant ne sera jamais un remède au vide qui nous habite. Il fait juste faire en sorte qu’on est trop fatiguée, parfois, pour sentir le vide. »
Je suis TELLEMENT d’accord avec toi Martine. J’aurais aimé adopter (justement parce qu’il y a déjà tellement d’enfants), mais mon chum (comme plusieurs gars – c’est quoi votre problème avec ça?) ne veut rien savoir. J’ai eu la certitude qu’il fallait que je devienne mère le jour où j’ai failli avoir un accident de voiture. «On ne peut pas mourir, on a pas encore fait de bébé.» C’est la phrase qui m’obsédait, moi qui ai longtemps dit que je ne voulais pas devenir mère. Je me trouvais trop existentialiste, pas assez «complète», évoluée… À l’inverse de ces filles qui veulent combler un vide, moi, l’idée d’imposer mes bibittes à un enfant me rendait (encore plus) folle! Si j’avais attendu de me trouver à la hauteur comme être humain, je serais encore en train de me poser la question!
Je pense que tout est là : si on réfléchit trop à ce genre de chose, on se perd. Tout est une question d’instinct, peut importe qu’il nous dire de procréer ou pas!
Quant à «trouver un sens à sa vie», je pense que c’est justement pour ça qu’on est ici et qu’il n’y a jamais de réponse définitive…
P.S.: Moi j’ai souvent trouvé que faire un enfant était justement un geste égoïste pour certaines et, surtout, profondément narcissique. Je me disais qu’il fallait s’aimer démesurément pour vouloir se voir dans un autre être humain! (Là -dessus aussi mes réflexions ont évoluées – du moins, se sont atténuées…)
Tout à fait d’accord avec Marie-Julie » Si j’avais attendu de me trouver à la hauteur comme être humain, je serais encore en train de me poser la question »
Avoir un enfant c’est un appel, un instinct, ce n’est pas une décision rationelle.
Et même si je n’ai pas fait mes enfants dans le but de donner un sens à ma vie, c’est quand même par là que je l’ai trouvé.
Ce qui est aussi valable que de le trouver dans l’adoption, dans l’art, dans le bénévolat, dans n’importe quoi que te fait sentir que tu changes une parcelle de l’univers pour le mieux.
Et si on faisait un enfant par amour de la vie ?
Décider de donner la vie, c’est de l’amour gratuit, souvent sans le retour un peu espéré, pas toujours parce que ce sont les enfants des autres. C’est certainement pas un désir de laisser sa trace, en tout cas pas chez les femmes. Cette pensée était plus présente chez les hommes, responsables de la continuité du nom, mais c’est un peu dépassé aujourd’hui. Puis si c’était par obligation, vaut mieux que ce soit passé mode. On fait pas des enfants parce qu’il le faut…
Bon ben c’est la première fois que je « laisse ma trace » ici… mais je passe lire parfois. J’aime bien le rationel du propos.
Quand Maryse et moi avons décidé d’avoir des enfants, on était décidé. C’est tout. On ne s’est même pas posé d’autres questions. Du moins pour moi ce fut ainsi. Ma vie était établie, j’avais trouvé une femme que j’aime, j’avais eu une enfance heureuse avec de bons parents. J’imagine que sans le vouloir, je voulais donner la chance à des enfants de vivre cette enfance heureuse que j’ai vécue. Car être enfant, c’est un bonheur qu’on ne réalise qu’une fois devenu adulte. Si c’est plus compliqué que ça et que on se pose des questions, que on mesure les pour et les contres avant de prendre la décision d’avoir des enfants. C’est peut-être mieux de ne pas en faire.
Pour ce qui est du sens à la vie, c’est certain que les enfants donne un sens à notre vie. Car ils en prennent une grosse partie. Toutefois, si on en fait pour en obtenir un sens, alors c’est que le vide est plus présent dans notre vie que le sens qui l’occupe. Que pourra-t’on donner à ces enfants autrement que du vide qu’il voudront remplir on ne sais trop comment avec des choses superficielles. Comme faire des enfants pour donner un sens à leur vie ??? Bel avenir cela nous réserve.
Merci pour cette belle réflexion. On est chanceux de t’avoir Martine. Maintenant je vais jetter un coup d’oeil sur les autres commentaires.
La semaine passée j’ai vu ma fille accoucher. J’ai vu une femme courageuse et aimante. Depuis j’y vois la vie. Je l’ai souvent vu ailleurs, tout comme le courage et l’amour, mais cette semaine je goûte au moment présent, savoureux et tendre. Je remercie Laurence pour ce magnifique cadeau de vie.
vous donnez des leçons de morale aux gens qui veulent des enfants à tout prix mais vous n’avez pas à imposer quoi que ce soit. Et il vaut mieux être sur terre que pas du tout
@mauguin: Vous avez raison: je n’ai pas à imposer quoi que ce soit. C’est d’ailleurs pour ça que je ne le fais pas.