L’été de toutes les culpabilités

C’est le 16 juillet et jusqu’à maintenant cet été je n’ai vu aucun feux d’artifice, aucun spectacle du Festival de jazz, aucun film à Fantasia, aucun dessin de Nuit Blanche sur Mont-Royal, aucun show du Festival Juste pour Rire et j’ai raté le Festival international des percussions de Longueuil (que j’aime bien d’habitude). Et ce n’est pourtant pas parce que je ne sors pas.

En tant que montréalaise d’adoption, je me sens coupable.

Ce n’est pas très agréable comme feeling alors stupidement, j’ai hâte que la saison des festivals finisse.

Anniversaire

Ma mère est née un vendredi 13 juillet. Aujourd’hui serait donc son 78ième anniversaire. Elle est décédée il y a 11 ans d’un accident cérébro-vasculaire qui l’a emportée sans prévenir en plein milieu de la nuit, quelques jours après mon trentième anniversaire (j’habitais alors à San Francisco) et une dizaine de jours avant la naissance de son premier petit-fils. Ce petit garçon allait d’ailleurs naître le 4 juin, jour du 47ième anniversaire de mariage de mes parents (1949).

Quand ils se sont rencontrés, Marius et Madeleine étaient voisins sur le boulevard Langelier, dans la basse-ville de Québec. Sur cette photo, maman avait presque 20 ans et papa bientôt 24. Elle nous a toujours raconté que se marier en blanc, avec la grande robe et tout, c’était plutôt mal vu dans la basse-ville de l’époque. C’était un milieu très modeste et très religieux qui supportait mal le péché d’orgueil. Mais la jeune Madeleine, la cadette d’une famille de 14 enfants (elle était tante avant sa naissance!), a insisté: elle voulait une robe de mariée blanche. Elle voulait aussi une bague avec un vrai diamant, même s’il devait être tout petit. On voit bien dans ses yeux sur la photo que personne n’allait la faire changer d’idée. Une petite voix intérieure devait lui dire que cette exigence allait probablement être un des rares luxes auxquels elle aurait droit dans la vie, et le futur lui a donné raison.

Maman était une des personnes les moins sentimentales que j’ai connues (je ne tiens pas ça de nulle part). De son ensemble de mariée, elle avait simplement conservé le voile avec lequel elle nous laissait jouer sans hésiter. Elle n’aimait pas beaucoup les bijoux et quand j’ai atteint l’âge de 16 ans, elle a distribué à ses trois filles les trois bagues en sa possession qui avaient de la valeur. C’était un geste assez étonnant de sa part, puisqu’elle n’était pas très portée sur la symbolique mère-fille. C’est moi qui ai hérité de sa bague de fiançailles avec un petit diamant. Elle est montée de façon très élégante et classique, avec de l’or à deux tons.

Je ne la porte presque jamais, mais je vais le faire aujourd’hui.

Quand j’ai annoncé le décès de maman à ma coiffeuse de l’époque, elle m’a serrée dans ses bras devant tout le monde au salon, ce qui m’a gênée un peu. Puis elle m’a dit que ma mère était peut-être partie, mais que ma relation avec elle n’était pas terminée et qu’elle allait continuer d’évoluer. Elle était un peu « new age » comme coiffeuse, alors j’ai pris ses propos avec un grain de sel, sans trop les comprendre. Avec les années, je me suis rendue compte que c’est une des choses les plus perspicaces qu’on m’ait dites suite à un deuil.