La chair et l’os

Grosse journ�e hier : �a faisait longtemps que je n�avais pas eu une blind date et j��tais un peu nerveuse. Remarquez, je dis � blind date � mais ce n�est pas tout � fait vrai : j�avais vu quelques photos de lui sur le Web. Je savais cependant qu�il avait s�lectionn� lui-m�me ces photos et qu�elles le repr�sentaient probablement sous son meilleur jour. Entre l�image et son incarnation, il y a tout un monde. C�est � l��tendue de cette distance que je songeais en me stationnant en face de chez lui.

Levant les yeux vers le deuxi�me �tage, j�ai cherch� son adresse. J�ai trouv� celle qui correspondait au petit bout de papier que je tenais, tout chiffonn�, entre mes doigts. Au-dessous de son appartement, une grande enseigne lumineuse annon�ait fi�rement la location de vid�os trois X. �tait-ce vraiment une bonne id�e d�aller le rencontrer chez lui? Pourquoi n�avais-je pas choisi d�aller directement dans un caf� ou un restaurant?

Nous �tions apr�s tout deux �trangers, deux personnes aux univers compl�tement diff�rents. Moi, les deux pieds biens ancr�s sur la terre ferme. Lui, la t�te et le c�ur dans les vagues. Nous croyions pourtant bien nous conna�tre mais j�avais d�j� rencontr� d�autres hommes sur Internet auparavant et je connaissais bien la force de cette illusion�barre oblique-d�sillusion.

Nous nous �tions rencontr�s sur le Web il y a � peu pr�s deux ans. Une sorte de coup de foudre que je n�arrive toujours pas � m�expliquer. Il disait que mon carnet l�avait inspir� � d�marrer le sien. J�ai �t� foudroy�e d�s le d�part par le force de ses mots et de son caract�re. Derri�re une grande gueule, je devinais chez lui un �tre d�une sensibilit� exceptionnelle. Il avait l�humour de ceux qui sont pass�s par de grandes douleurs et m�me s�il mena�ait souvent de tout balancer, je le soup�onnais d��tre farouchement attach� � la vie. Probablement parce qu�elle faisait �cho � la mienne, j�aimais son incapacit� au d�tachement.

Je n��tais pas la seule � m�int�resser � lui. Son carnet est devenu rapidement tr�s populaire dans la blogosph�re francophone, lui attirant un trafic qu�il s�amuserait � qualifier d�ind�sirable. Des femmes, des hommes, des chats et m�me des enfants venaient vers lui tout naturellement, malgr� ses coups de gueule et ses envies de nous claquer la porte au nez.

Debout devant chez lui, le doigt tendu comme un symbole vers la sonnette de son appartement, je songeais � ces rencontres qui tournent mal, � cette magie du monde en ligne qui s�arr�te en g�n�ral au paillasson, refusant de franchir les quelques pas de plus vers ce monde qu�on se plait � qualifier de r�el. Mais voil�, je vieillis. (J�aurai 38 ans ce vendredi.) Mes angoisses, tout comme mes passions, s�att�nuent et j�en suis ravie. (Heureusement que je n�avais pas lu son billet avant de partir!). Avant m�me qu�il ne vienne m�ouvrir, j�avais compris que cette rencontre allait �tre agr�able. Je savais qu�il y aurait un tout petit choc, � peine l��bauche d�un tremblement de terre entre la chair et l�os et les mots que je connaissais d�j�. La porte s�est entrouverte et avant de voir son sourire, j�ai �t� envelopp�e par un tout petit nuage de fum�e, par la douce odeur de la pipe venue gentiment me faire la bise.

J�ai donc rencontr� le Capitaine, une rencontre qui a pris l�espace d�un apr�s-midi. Une journ�e vol�e au temps, aux t�ches et aux blogues. Si nos personnalit�s en ligne se connaissent bien, il nous reste un certain apprivoisement � faire en personne. Je dois m�habituer � la douceur de sa voix, au rythme lent de son discours, � ses yeux qui cherchent les mots alors que ses doigts semblent taper si vite. Il devra se faire � mon babillage et au fait que je n�ai ni la gr�ce d�une muse, ni l�autorit� d�une �g�rie.

� partir de maintenant, quand je le lirai, il me faudra ajouter une nouvelle dimension � ses �crits, apportant encore plus de nuances � ses mots. Non, le passage entre la rencontre Web et la rencontre en personne n�est pas absolument n�cessaire. Il apporte tout de m�me parfois de bien jolies couleurs au portrait.

Gladiator

In a previous life, my beau used to make money (and art, of course) with his great photo skills. He now maintains a photo blog which he updates every Monday, hence the name Monday Morning Photo Blog. Check out this week’s picture (you might have to glue your face to the screen to see the details). It’s one of my favorites.

Vroum vroum

� mon retour de San Francisco, je me plaignais des manques de signes de l’arriv�e du printemps. Voil� qu’en une semaine ou deux, les feuilles de nos �rables ont presque atteint leur pleine taille, le lilas fleurira bient�t et tous les gazons du voisinage sont verts, sauf le n�tre… N�glig�e par les propri�taires pr�c�dents, la pelouse qui devrait orner le devant de notre maison n’est qu’un amas de terre dure, de chiendent et d’autres herbes qui, ma foi, ne sont pas si laides que �a. J’ai toujours d�test� la verdure artificielle des terrains de golf, mais j’avoue que nous devrons nous attaquer � ce gazon tr�s bient�t…

Mais voil�, nos priorit�s �taient ailleurs le weekend dernier. Il fallait entre autre pr�parer le sol pour l’arriv�e imminente du nouveau cabanon, prendre des mesures pour notre futur patio et bien s�r, sortir mon scooter de sa retraite hivernale! Maintenant que ma tendre moiti� est aussi devenue propri�taire d’une de ces rutilantes machines (achet�e � bon prix de mon beau-fr�re, en �change d’un ordinateur), nous avons d�cid� de tenter le tout pour le tout et de sortir nous-m�mes mon scooter remis� au sous-sol. Entreprise p�rilleuse! Le long escalier ext�rieur qui m�ne au sous-sol a une pente tr�s prononc�e et ma force, de m�me que la longueur de mes bras, sont limit�es. Heureusement que B. a les jambes solides! Nous avons bien failli abandonner � mi-chemin et attendre la visite d’un ami � gros bras mais voil�, nous �tions d�termin�s (et en manque d’amis � gros bras). Pousse, tire, pousse, tire, le scooter a gravi les marches et nous nous en sommes tir�s avec quelques muscles endoloris. Qui a dit que la vie de banlieue �tait sans danger?

Comme il restait encore quelques heures de soleil au weekend, nous avons d�cid� de les honorer en faisant une premi�re ballade de 40km. Et le bonheur, c’est que m�me avec la hausse du co�t de l’essence, un scooter fait le plein pour moins de 5$. Moi qui voyais l’utilisation d’un scooter comme une activit� essentiellement urbaine, je dois avouer que j’ai �t� s�duite par la conduite sur une longue route tranquille, bord�e par les champs des cultivateurs, sans sou�i des limites de vitesse, sauf celles du moteur, bien entendu…